Golden gold T.1, Seita HORIO

Sur l’île peu peuplée et isolée de Neijima où aurait vécu selon la légende un Fukunomaki, un Dieu du bonheur, deux amis avec des visions opposées de la vie s’apprêtent à se séparer. Oikawa est un adolescent qui adore les mangas et le magasin Animate que l’on ne trouve que dans les grandes villes. Quant à Ruka Hayasaka, elle est asociale, remplie de doutes et de méfiance et a rencontré des difficultés au collège car elle n’a pas réussi à s’intégrer.

En parallèle, un éditeur et une autrice s’apprêtent à accoster sur cette île, dans le but d’écrire son prochain roman. Ils vont loger dans la pension que gère la grand-mère d’Hayasaka. Alors que Ruka était partie pêcher des fruits de mer pour les clients, elle trouve échouée une momie rabougrie et visqueuse, à qui elle va malheureusement casser un bras en tentant de la nettoyer. Elle va finir par la déposer dans un autel semi-enterré près du temple. Mais avant de partir elle lui adresse une prière : celle qu’une grande boutique Animate soit ouverte sur l’île afin que son ami ne déménage pas. C’est alors que d’étranges phénomènes vont se produire : tout d’abord la momie prend vie et se met à poursuivre Hayasaka. Puis elle s’installe chez elle et le commerce, ainsi que la pension de sa grand mère, commencent à voir les clients affluer et à prospérer. Cependant seules les personnes non originaires de l’île peuvent voir la véritable apparence de la momie, pour les insulaires, elle ressemble à une personne âgée tout à fait normale. Nous nous sentons donc exclu de cet endroit et avons un regard extérieur sur la situation.

Alors cette statuette est-elle vraiment un Dieu et plus particulièrement un Fukunomaki ? Quel est son but ? Et est-ce-que les Dieux sont tous bienveillants ?

L’angoisse est de plus en plus présente au fur et à mesure du tome, rendant l’ambiance suffocante et le lecteur totalement impuissant face à ce qui se déroule, en jouant notamment sur les pertes de repères entre ce qui est réel ou illusoire. En ce qui concerne l’histoire, elle va suivre deux fils rouges distincts : celui où Hayasaka essaye de se rapprocher de son ami et de l’empêcher de partir quitte à tenter de gagner les fonds nécessaires pour ouvrir sa propre librairie. Et celui suivant le devenir de cette étrange momie presque mutique, qui a quasiment toujours la même expression, que personne ne voit manger, qui change d’apparence au fur et à mesure que les jours passent, qui étire une longue langue pour boire, que l’on ne peut pas prendre en photo et qui manipule/influence les gens. L’exemple le plus frappant est celui de la grand-mère de Ruka, qui change physiquement et moralement jusqu’à prendre l’apparence de la statuette, et qui va même lui construire un autel dans sa chambre, donnant l’impression de l’émergence d’une nouvelle religion. D’ailleurs elle se met à parler à la place de la momie comme si elle était possédée. Un autre fait marquant, est celui de l’éditeur qui en rentrant à Tokyo a totalement oublié l’existence de la statuette et des étranges évènements qu’il a vécu, renforçant l’isolement de l’île.

On voit aussi que les protagonistes ont des ambitions et des rêves différents et que malgré leurs doutes, ils ne vont pas hésiter à se servir de la momie pour les réaliser : l’éditeur veut un scoop (donc la gloire et l’argent), la romancière veut récupérer l’argent perdu au Pachinko (machine à sous japonaise) et Ruka garder son ami auprès d’elle. Mais la statuette a-t-elle vraiment ce pouvoir ? Ne sert-elle pas juste à attirer les gens et l’argent ?

Au fil du tome, l’argent monte à la tête des personnes : la grand-mère de Ruka devient égoïste et pense à son propre profit, l’éditeur ment à son écrivain en lui promettant qu’il ne dira rien de ce qui se passe sur l’île à Tokyo… Derrière cette histoire qui semble être une banale fiction au premier abord, se cache en réalité une dénonciation de la dérive de l’argent et du changement qu’il amène chez les gens. Il met aussi en avant, afin de mieux les démonter, les clichés qu’ont les citadins envers les campagnards. On peut également y voir une vision cynique de l’être humain, obnubilé par le profit et la gloire.

Un titre intrigant à découvrir dans les bibliothèques de Paris

Laisser un commentaire